Introduction

Eric Bardou



Connaissance du danger

Le danger des ruptures de barrages naturels en milieu de haute-montagne (sous entendu lié de près ou de loin au système glaciaire) se manifeste par l'apparition soudaine d'une pointe de débit généralement supérieur aux débits caractéristiques utilisés pour le dimensionnement d'infrastructures.

Dans cette Université Européenne d'Eté (UEE) nous nous focaliserons sur les débâcles liées à des ruptures de digues constituées de débris rocheux (moraine et/ou dépôt d'éboulement) ou de glace pure (parois d'un lac supra-glaciaire). Nous n'aborderons pas les spécificités des débâcles liées à l'activité volcanique sous-glaciaire, les fameux jökulhlaups islandais.

Plusieurs éléments font de ces débâcles un sujet complexe. L'un d'eux est la question de la “fréquence”. Dans le contexte européen de gestion des risques, ces débâcles glaciaires n'entre pas dans la matrice intensité-fréquence standard. On a des événements très intenses qui n'arriveront peut être qu'une fois. Mais du fait des changements environnementaux intenses que subissent les Alpes “cet événement” peut arriver demain. Tout dépend des conditions locales. Aussi, la gestion intégrée des risques liés à la rupture de barrages naturels en altitude doit être étudiés d'une manière adaptée.

Autre complication, la source du danger, l'aléa, est souvent très éloigné du site où le risque se matérialise. En plus de l'éloignement, l'aléa se trouve souvent dans des régions difficiles d'accès et peu fréquentée. La détection du danger lui même, est donc souvent une phase importante suivant les endroits. La détection à l'échelle régionale ne sera pas traitée dans cette UEE, mais on pourra se reporter au papier de Strozzi et al., 2012, pour les méthodes de détection satellitaire et à celui de Gruber et Mergili, 2013 pour l'exploitation de ce genre de résultat.

Dans son rapport sur les événements extrêmes,l'IPCC (2012, p.186), “estime avec un degré de confiance élevé que les modifications affectant les vagues de chaleur, la fonte des glaciers et/ou la dégradation du pergélisol auront des répercussions sur divers phénomènes des hautes montagnes, tels que l’instabilité des pentes, les mouvements de masse et les crues provoquées par la vidange soudaine de lacs glaciaires”.

Les situations typiques

La figure ci dessous, montre les principales localisations possibles des lacs pouvant générer des débâcles (lors d'une phase de récession glaciaire) dans le contexte de l'UEE. On peut y distinguer principalement deux grands types d'édifices lacustre, soit :

  • Les lacs purement glaciaires, l'ensemble des bordures étant formée principalement de glace. Attention à l'existence possible de lacs sous-glaciaires difficilement détectable.
  • Les lacs dont les berges sont toutes ou en partie formée par du matériel rocheux (potentiellement mélangé à de la glace). Il peut s'agir de moraines, d'un dépôt d'éboulement, d'un glacier rocheux ou d'un verrou rocheux.


Figure 1: Les différents agencements possibles des lacs “paraglaciaire” dans une phase de récession glaciaire.

Quelques cas historiques

La débâcle de Giétroz

Durant le Petit-Âge-Glaciaire, le glacier de Giétroz barra plusieurs fois le cours de la Dranse (Val de Bagnes, Suisse), causant plusieurs crues. Plusieurs de ces crues firent des victimes.

En 1818, un lac avait été observé et des travaux de réduction du risque ont été entrepris. L'ingénieur cantonal Ignaz Venetz a prévu de vidanger le lac de façon contrôlée afin d'en réduire le volume en cas de rupture. Ces travaux furent efficaces mais engendrèrent la polémique, car le chenal de vidange, créé à même la glace, engendra un érosion thermique de la digue, qui fini par céder.

Figure 2: Le glacier de Giétroz retenant le lac responsable de la débâcle de 1818 (Escher von der Linth, 1818)

Glacier du Belvèdère

Glacier du Belvédère est un glacier dont la langue est largement recouverte de débris. Elle est alimentée par les glaciers suspendus, les avalanches ainsi que des chutes de pierres de l'imposante face est du Monte Rose.

Au XIXème siècle le glacier du Belvédère a déjà produit plusieurs débâcle. En août 1868 une “poche d'eau” s'échappe par la moraine de la langue de gauche. Suite à de forte pluie, en août 1896 une nouvelle débâcle dévaste la vallée. Puis en 1904 et en 1922 la chronique fait état d'autres événement impliquant le glacier. Dans les années 1970, (en août 1970, 1978 et en juillet 1979) le lac du Locce, retenu par la moraine du glacier éponyme surplombant le glacier du Belvédère produit lui aussi au moins 3 débâcles (Kääb et al., 2004).

C'est dans ce contexte, qu'à l'automne 2001 un lac est identifié, occuppant la partie supérieure du glacier à hauteur d'environ 2150m. En 2002 suite à une vague de chaleur anormale qui a touché les Alpes et la Méditerranée depuis 14 Juin, le niveau a augmenté rapidement. Sa surface a atteint 150 000 m2 avec une profondeur de plus de 40 m. Le volume d'eau n'était pas connus avec précision, mais il pouvait se trouver autour de 3 millions de m3. Le niveau du lac augmentait alors de ~1m/jour.

Au vu du risque, les autorités ont alors décidés d'installer un système de monitoring (niveau du lac, stabilité de la digue) et installé un système pour vidanger le lac pour et ainsi en diminuer le niveau. Ces mesures ont permis d'éviter une catastrophe, lorsque le 18 juin 2003 les lac s'est vidangé naturellement.

Figure 3: Le glacier du Belvédère et les différents lacs ayant causés des débâcles (source: G. Mortara)

Tête Rousse

Un autre cas historique oùl'homme est intervenu à la source est la “poche d'eau” du glacier de Tête Rousse (St-Gervais, F).

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introduction.txt · Last modified: 2014/10/16 10:35 by eribar
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